Annecy, 100e ville adhérente du Club des Territoires Un Plus Bio
Chloé Rivière : « Annecy dépassera les objectifs de la loi EGalim dès 2022 »
La nouvelle majorité issue des élections municipales à Annecy (74) porte une vision politique dynamique de l’alimentation à l’échelle de ce territoire montagnard, où l’agriculture laitière domine encore très largement. Le témoignage de Chloé Rivière, jeune élue à la restauration municipale et à l’alimentation locale et biologique.
Un Plus Bio : Dans quel état avez-vous trouvé l’outil de restauration collective en arrivant à la mairie ?
Chloé Rivière : Je dois dire que nous disposons à Annecy d’un outil techniquement très performant. Nos quatre unités de production, dont une est gérée par un délégataire, produisent 9 000 repas par jour, répartis à 60% vers les scolaires, petite enfance et jeunesse, et 40% vers les Ehpad. Particularité de notre territoire : la démographie est vieillissante, les seniors bénéficient de plusieurs repas par jour par rapport aux écoles, ils représentent donc une part importante des repas produits et cette part est encore appelée à grandir dans les années qui viennent avec la reprise en régie de certains Ehpad en fin de marché délégué. Nous cherchons à organiser notre production en deux entités distinctes et spécialisées sur ces deux secteurs, tout en préservant une unité expérimentale.
Territoire de montagne, quelle est la particularité des productions agricoles autour d’Annecy ?
Nous sommes sur une aire géographique où l’agriculture laitière domine à 90%. Cela nous amène à réfléchir au développement d’autres filières, et notamment au maraîchage, dans l’optique de relocaliser la production. Notre ville compte 130 000 habitants, 250 000 au sein du Grand Annecy. Un projet alimentaire territorial (PAT) est en cours de développement qui fait de la question alimentaire un important levier de développement économique et agricole. Mais c’est un challenge assez complexe : nous avons dans nos cuisines quelque 8 000 fiches techniques de produits à faire évoluer !
Quel est votre angle d’attaque sur le mandat à venir ?
Sur un plan politique et philosophique, je dirais qu’il consiste d’abord à créer du lien. Du lien chez les élus, nous sommes très nombreux au sein du territoire de la nouvelle commune née en 2017 et de celui de l’agglomération et il me semble important, dans un premier temps, d’apprendre à nous connaître pour discuter et mieux progresser ensemble. Il faut aussi faire du lien entre les consommateurs urbains concentrés sur Annecy même, qui ont des attentes sur les questions sociales et environnementales, et les agriculteurs du bassin, lequel reste majoritairement rural. La bonne surprise est que de grandes connexions sont possibles.
Le Club des Territoires Un Plus Bio, c’est (en février 2021) :
100 collectivités adhérentes : 7 départements, 1 région, 82 communes, 7 intercommunalités, 3 territoires de projet, soit un total de 525 communes, plus de 600 000 repas/jour.
Sur un plan plus opérationnel, nous affichons l’ambition de dépasser les objectifs de la loi EGalim dès janvier prochain. Le bio est présent à 7% aujourd’hui dans notre marché alimentaire, on souhaite arriver rapidement à l’objectif de 30% dès 2022. Pour le moment, nous sommes en plein arbitrage et, même si j’ai compris que manger mieux sur un territoire n’est pas forcément plus coûteux à long terme, nous devons ajuster certains budgets de services à la hausse pour atteindre rapidement nos objectifs. Demander aux techniciens de ces différents services de faire un nouveau travail de fourmi alors qu’ils sont déjà à fond sur leurs dossiers, cela doit passer par un coup de pouce.
Sur les approvisionnements, nous bénéficions du levier du groupement régional d’achat, le Graal, à l’échelle de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Nous avons adhéré à cette plate-forme majoritairement pour des produits congelés ou secs, tout en préservant notre liberté de recourir à des productions de proximité chaque fois que c’est possible. Rapidement aussi, nous comptons sur le PAT pour cibler tous les porteurs de projets agricoles sur l’ensemble des communes afin de trouver des solutions foncières.
Est-ce qu’il vous paraît subtil, voire difficile, de composer avec tous les élus du Grand Annecy quand vos objectifs municipaux sont clairs et déterminés ?
Au contraire, et c’est une heureuse découverte. Annecy est par nature coincée entre le lac et les montagnes, elle compte très peu de foncier disponible. L’échelle du PAT (Projet alimentaire territorial) du Grand Annecy est par conséquent la plus pertinente pour raisonner sur l’alimentation et faire se rencontrer deux mondes, l’urbain d’un côté, le rural de l’autre. Comment amener des producteurs locaux, des transformateurs vertueux, à mieux travailler avec la collectivité, au-delà du poids des démarches et de la paperasse que représente le fait de répondre à un appel d’offres ? C’est sans doute ce qu’il y a de moins évident à faire mais de plus mobilisant ! Grâce au PAT, on discute techniques, besoins et ressources, flux alimentaires, etc. Nous avons collectivement une vraie carte à jouer.
Un lac, des montagnes, un joli bassin urbain, Annecy est un écrin en Haute-Savoie.