Le récit de la folle journée des cantines rebelles 2020 !
Ils ont tous répondu à l’invitation d’Un Plus Bio : Anne Hidalgo, Audrey Pulvar, Patrick Bloche, Pascal Légitimus, Laurent Mariotte, Georgiana Viou… la liste est longue (et non exhaustive) des précieux invités de la Journée nationale des cantines rebelles qui a eu lieu le 14 octobre 2020 à l’Hôtel de ville de Paris. Ils sont venus enrichir le débat, prendre des engagements officiels, croiser des pairs et nouer de nouvelles relations, et ont assisté à la fameuse célébration des lauréats des 5e Victoires des cantines rebelles. La démocratie alimentaire en action !
Le plein de visiteurs
Resserrée sur une grande matinée pour cause de contexte sanitaire, la journée nationale des cantines rebelles n’a pas empêché de voir les membres et les sympathisants d’Un Plus Bio faire sa fête à l’alimentation durable sur tous les territoires. Après l’introduction par le président Gilles Pérole, trois élus de Paris ont ouvert la matinée. D’abord la maire Anne Hidalgo (lire ci-dessous), suivie de Audrey Pulvar, l’élue en charge de l’alimentation durable, de l’agriculture et des circuits courts de proximité, et de Patrick Bloche, adjoint délégué à l’éducation, à la petite enfance, aux familles, aux nouveaux apprentissages et au Conseil de Paris.
Pour Un Plus Bio, cet accueil par la ville de Paris (membre du Club des Territoires et lauréat des cantines rebelles en 2019), envoie un signal fort de soutien et d’engagement à tout l’écosystème de notre association.
Deuxième temps fort de la journée : la présentation par Lise Pujos, responsable du label En Cuisine d’Ecocert, de « Cantines bio : le guide pratique des parents #2 ». La spécialiste des questions de qualité en restauration collective a témoigné de son expérience citoyenne et de mère à la conquête d’une meilleure alimentation dans la cantine de son enfant, ainsi que de la manière dont le guide parents lui a facilité la tâche aux côtés d’autres parents.
Comme à chaque édition, un débat a ensuite eu lieu, réunissant des élus, des techniciens et des acteurs de terrain. Sur le thème « L’alimentation mérite mieux », la table ronde animée par Élisabeth Martin, co-fondatrice de Alimentation générale, a amené trois témoignages : une cantine municipale qui réinvente sa fonction et fait évoluer son territoire avec Didier Thévenet, directeur de la restauration de Lons-le-Saunier (39) ; un réseau de producteurs qui cherche à approvisionner intelligemment son territoire en visant le juste prix et la bonne démarche avec Jean-Michel Péard, co-fondateur du réseau «Invitation à la ferme», une filière autour des produits laitiers constituée dans l’ouest par des fermiers bio et indépendants ; enfin une élue qui a engagé depuis plusieurs années sa ville dans une alimentation durable, pour la santé de tous et l’égalité des chances : Annie Kinas, adjointe à l’éducation à la ville de Martigues (13).
C’était ensuite aux Victoires des cantines rebelles de faire leur show annuel (lire ci-dessous), avec cette année neuf lauréats distingués par un jury très engagé, réuni en septembre dernier dans le Vaucluse au château de Massillan, propriété de Didier Perréol, grand entrepreneur de la bio et soutien fidèle d’un Plus Bio. Ce jury était composé de l’humoriste Pascal Légitimus et la cheffe marseillaise Georgiana Viou, tous deux parrain et marraine de cette cinquième édition, ainsi que du journaliste et animateur Laurent Mariotte, du sénateur Guillaume Gontard, de la jeune designer Chloé Adelheim, du paysagiste international Gilles Clément, de la vice présidente d’Un Plus Bio Catherine Brette, du chercheur Christophe Lavelle et de la journaliste Christina Vieira.
Le soutien et le regard d'Anne Hidalgo
Malgré un agenda chargé, la maire de Paris est venue passer un moment aux côtés d’Un Plus Bio avec Audrey Pulvar, sa nouvelle adjointe en charge de l’alimentation durable, de l’agriculture et des circuits courts de proximité.
L’occasion de dire tout le bien qu’elle pense des cantines rebelles et de faire le point sur le plan Alimentation durable de la ville de Paris, avec l’objectif de 100% de bio dans les cantines de la capitale d’ici la fin du mandat.
Objectif 100% de bio à Paris d’ici à 2026
Où en est le projet alimentaire de la plus grande commune de France et ses 30 millions de repas servis chaque année ? Réponse : il a bien avancé durant le premier mandat d’Anne Hidalgo, et se poursuit avec une belle énergie depuis sa réélection en juin dernier. Avec l’ancienne journaliste Audrey Pulvar aux commandes, le but est de poursuivre vite et fort la progression engagée. « On souhaite passer de 50% de bio (et même parfois plus selon les endroits) à 100% de bio d’ici la fin du mandat, confirme l’élue en charge de l’alimentation durable, de l’agriculture et des circuits courts de proximité. Mais ce qu’on veut surtout, c’est réduire les distances car actuellement, on travaille sur un rayon de 600 km, ce qui est quand même beaucoup, l’objectif serait de réduire à 250 km. Alors c’est un challenge très ambitieux mais on le relèvera, avec les agriculteurs qui sont prêts à s’engager avec nous dans cette démarche, je pense bien sûr à ceux de l’Île-de-France mais aussi à ceux des territoires voisins, comme la Bretagne, les Hauts-de-France ou la Bourgogne. L’idée c’est vraiment d’aider à l’installation, à la conversion et au maintien des agriculteurs qui sont prêts à s’engager dans une production la plus respectueuse possible de l’environnement. »
« Une question de volonté et de détermination politiques »
La maire Anne Hidalgo explique comment parvenir à cet objectif d’une meilleure santé dans l’assiette comme à un meilleur équilibre des paysages agricoles de la région : « C’est une question de volonté et de détermination politiques. Quand on comprend qu’on a une grande force de frappe, c’est-à-dire une capacité à faire bouger les filières du producteur au consommateur, on a le devoir impératif de s’y atteler. Et la restauration collective est justement structurante pour atteindre ces objectifs. Nous sommes en train de travailler à la création d’une coopérative, AgriParis, dans laquelle les producteurs, les agriculteurs mais aussi les consommateurs vont travailler sur les besoins. Nous avons la chance d’avoir des terres préservées en dehors de Paris, notamment le long des cours d’eau, que nous remettons en fonctionnement pour des agriculteurs qui s’installent en bio. »
Voilà pourquoi la journée nationale des cantines rebelles n’est pas passée inaperçue des deux élues. « Ce que j’aime dans ces initiatives des cantines rebelles c’est qu’il y a beaucoup d’échange d’expériences, témoigne Anne Hidalgo, et c’est justement comme ça qu’on avance. Paris a pu progresser en voyant beaucoup de communes, parfois de toutes petites communes autour de nous, et on s’est dit que si elles parviennent à faire bouger les lignes, il n’y a pas de raison qu’on n’y arrive pas de notre côté ! L’alimentation durable est aussi une affaire d’émulation collective. »
Le billet politique de Pascal Légitimus : Lettre à Raymond Santo !
Membre du jury et parrain des Victoires des cantines rebelles 2020 (aux côtés de la cheffe marseillaise Georgiana Viou), le plus célèbre des Inconnus a donné beaucoup de joie et de force à cette cinquième édition. Très engagé sur les questions d’environnement, l’humoriste a ouvert la séance des Victoires par une lettre intitulée « Sois bio et tais-toi, ma lettre à Raymond Santo ».
Profitant de leur rencontre aux Victoires et dans le cadre de leur participation au jury, Pascal Légitmus et Laurent Mariotte se sont retrouvés quelques jours plus tard dans l’émission culinaire du second, « La table des bons vivants » chaque samedi sur Europe 1. A réécouter ici !
Les victoires des cantines rebelles font bouger la démocratie alimentaire
Pour leur cinquième édition, les Victoires étaient plus que jamais politiques. Il y a en effet du changement dans l’air. Il ne s’agit plus seulement de distinguer des candidats engagés dans les fourneaux de la restauration collective.
De plus en plus, les lauréats s’emparent de questions qui vont au-delà des seuls réfectoires. Santé publique, gestion du foncier, solidarités, éducation : l’alimentation est un véritable bien commun.
Neuf lauréats ont été distingués, qui viennent de toute la France. Il y a par exemple le prix spécial du jury, décerné à Lons-le-Saunier, la préfecture du Jura qui a engagé un gros travail de fond depuis une vingtaine d’années. Au départ, c’était la qualité de l’eau du robinet, polluée aux nitrates, qu’il a fallu soigner. Un dialogue s’est alors ouvert dans la plaine de captage de la ville avec les agriculteurs, pour voir en quoi il était possible de réformer les modes de culture. C’est ainsi que la filière pain bio s’est mise en place. Plus tard, ce sont les éleveurs qui ont été invités à évoluer. En échange, ils bénéficiaient du débouché de la cuisine centrale, laquelle dessert plus de 5000 repas par jour. « En 2019, éclaire le chef de la restauration Didier Thévenet, par ailleurs vice-président de l’association Agores partenaire d’Un Plus Bio, ce sont 180 bovins bio achetés sur pied qui ont été reçus et préparés à la cuisine centrale. » Une légumerie a également vu le jour et, au final, outre une restauration collective nettement améliorée, la qualité de l’eau potable a retrouvé des couleurs, pour un prix qui n’a pas bougé.
Les Victoires sont l’occasion de valoriser les initiatives de terrain. Ainsi celle du village de Lagraulet-du-Gers (32), passé au 100% bio en moins d’un an, avec la création d’une régie agricole et la conversion de toute la commune à un modèle plus résilient sur les plans politique, social et écologique. De même dans certaines crèches dont celle de Tom Pouce, à Châtillon-sur-Chalaronne (01), où ce sont les parents citoyens qui sont à l’œuvre pour faire bouger le modèle alimentaire local. Cette année d’ailleurs, une innovation des Victoires a donné la possibilité aux citoyens de voter en ligne pour ce « Coup de coeur des mangeurs » avec plus de 3000 votants.
Quant aux grandes collectivités, on a pu apprécier l’initiative du Sivu de Bordeaux-Mérignac, engagé depuis longtemps dans le bio et le local, avec le développement d’une ceinture verte agricole sur la région qui permet d’approvisionner en direct la cuisine centrale où se préparent plus de 25 000 repas par jour dont plus de 35% en bio.
Les Victoires ont ainsi cette force de regarder plus loin que les assiettes. Bien sûr la cantine reste un levier principal du développement local, mais c’est bien davantage un cheval de Troie dans l’espace émergent de la démocratie alimentaire où, du foncier à la cantine en passant par l’agriculture, le dialogue avec les citoyens et une autre approche de la santé publique, se dessine un monde plein de promesses et de beaux lendemains.